samedi 10 novembre 2007

Plaisirs et délices...

Foire aux Plaisirs

Le son du canon s’est tu, remplacé par des cris, des rires et une joyeuse cacophonie musicale. Les armées de Louis XIV ont cédé le pas à des légions de petits canards que les enfants pêchent dans l’espérance du gros lot.


Les fusils ne sont plus qu’à air comprimé et visent de petits ballons bigarrés sous l’œil imperturbable du forain qui, la cigarettes collée aux lèvres, détient seul les règles du jeu.

Les balles sont des balles de ping-pong qu’il convient d’arracher à une tranquille et lancinante soufflerie afin de gagner des bijoux en plastique, un précaire pistolet ou encore un ustensile pour bulles de savon.

On ne tire plus sur la ville.

Le Château Trompette n’est plus. Sa démolition, entamée en 1818, a permis d’alimenter en pierres la construction des immeubles alentour, notamment le bel hôtel Gobineau. Et, sur son ancienne emprise, place des Quinconces, la Foire aux Plaisirs a développé son emprise. Derrière ses remparts de frites et de chichis, de nougats, de crêpes et de barbes à papa, elle propose depuis 1850 friandises sirupeuses et jeux pour tous les âges.

Elle est d'une émouvante fidélité. Arrivant au printemps, elle accompagne les fleurs et les bourgeons qui dressent leurs beaux et joyeux coloris, puis revient à l’automne, alors que les végétaux qu’elle a vu naître se teintent de couleurs de tristesse ou jonchent le sol.

C’est la Grande Roue qui sort de terre la première, annonçant à la ronde que les forains sont de retour et que la fête va empourprer la ville. Elle se structure lentement et sa belle architecture ronde est une invite à venir nombreux profiter des stands qui seront ouverts durant quatre semaines.
A ses pieds se déploient tous les jeux que l'imagination humaine a pu inventer pour distraire, permettre de partager des moments de joie, assurer des sensations fortes et...garantir des royalties à son exploitant.
Le succès est toujours garanti. Chaque édition voit près de 400 000 visiteurs arpenter les allées strictement agencées au sein de la belle esplanade. On y va en famille ou par bandes de copains. On espère briser la solitude par d’heureuses rencontres. On rigole, on s’esclaffe, on se défie pour tester la nouvelle attraction qui nargue les lois de la gravitation.
On se donne les émois les plus fous. On espère que l’euphorie émotionnelle viendra en aide aux flirts les plus hardis. Les mains baladeuses vont bon train, rampant sur les pull-over comme des chenilles incontrôlées, les enlacements furtifs se multiplient, les audaces du grand huit favorisent celles de l’amour.

On s’agglutine autour des auto-tamponneuses, on parle vainement, on se provoque gentiment.

La queue de Mickey, toujours très sollicitée, est vive et alerte. Le train fantôme crée des frayeurs fausses et routinières.

Le labyrinthique palais des glaces réinvente le mythe de Thésée, sans le charme d’Ariane. Les loteries engrangent leurs lots de perdants. La chenille redémarre sans fin.

Les balançoires virevoltent dans les airs avec leurs cortèges de hurlements stridents. Oxygène, le train qui tourne dans les airs, fait valser ses usagers comme des boules de loto abandonnées aux lois des forces centrifuges.

Et au cœur de cette effervescence, le petit théâtre de Saint Antoine officie toujours paisiblement avec son légendaire cochon.

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